Article publié dans le numéro 137 de avril 2018 de la revue Experts
Dans cet article, après une définition des notions de neutralité et de parti pris, nous analyserons l’exposition de
l’expert, au sens qu’il est confronté au regard et à l’influence possible des parties, dans le cadre de la conduite de ses
missions et les positions qu’il doit prendre pour en éviter les aléas.
1. DÉFINITION DES TERMES
Pour débuter notre travail, il m’apparaît utile de commencer par définir les termes de neutralité et de parti pris, et de les rapprocher de ceux qu’on utilise couramment pour qualifier les nécessaires qualités de l’expert : l’objectivité et l’impartialité.
Commençons par la neutralité.
La neutralité est l’état d’une personne qui reste neutre, qui évite de prendre parti, qui s’abstient, qui ne s’implique pas. C’est donc l’état de quelqu’un, d’un groupe qui ne se prononce pour aucun parti, ou, de façon plus expertale, pour aucune partie.
En chimie et en physique c’est l’état ou la qualité d’un corps ou d’un milieu électriquement neutres. Et en psychanalyse, c’est l’attitude non directive de l’analyste à l’égard des opinions, des projets de son patient. Deux acceptions qui qualifient bien la position de l’expert.
Le dictionnaire Larousse nous dit que quelqu’un de neutre est une personne qui fait preuve de justice, d’équité, qui ne prend aucun parti dans son jugement et qui observe une stricte objectivité.
Ce qui nous conduit à la notion d’objectivité.
En philosophie et en science, l’objectivité est, toujours selon le Larousse, la « qualité de ce qui est conforme à la réalité, d’un jugement qui décrit les faits avec exactitude ». Si on enlève le terme de jugement, qui n’a pas cours dans notre fonction, être conforme à la vérité et décrire les faits avec exactitude présente bien la façon dont l’expert doit conduire la mission qui lui est confiée.
En d’autres termes, quoique proches, l’objectivité est donc la qualité de quelqu’un, d’un esprit, d’un groupe qui agit sans faire intervenir des préférences personnelles, qui dirige avec objectivité les débats.
Sur la notion de parti pris, il s’agit, toujours d’après les mêmes sources, d’une opinion préconçue, d’une position arrêtée une fois pour toutes. Pas loin d’être le contraire de la neutralité !
Et l’impartialité, qu’en dire ?
L’impartialité est par nature l’absence de parti pris. Elle est généralement associée à la neutralité, à l’équité, à l’objectivité et à la notion de justice.
Si on résume, l’objectivité de l’expert implique sa stricte neutralité, et c’est l’absence de parti pris qui amènera tout naturellement à l’impartialité de notre fonction. Tout est lié.
Ceci posé, regardons maintenant, en matière de neutralité et de parti pris, les pièges qui s’ouvrent sur la route de l’expert aux différents stades des opérations d’expertise.
2. À LA RÉCEPTION DE L’ORDONNANCE
Les difficultés de l’expert commencent dès la réception de la mission. Le simple choix d’accepter ou de refuser la mission peut déjà être analysé par les parties comme une certaine prise de position. Si une de ces parties considère que l’expert désigné est membre d’une profession pouvant être proche de celle de l’autre partie, l’expert sera d’emblée considéré comme pouvant être enclin à un certain parti pris. Par exemple, le choix d’un architecte expert dans un litige de bâtiment, dans lequel l’une des parties est un architecte, revêt un caractère de parti pris par l’idée que …
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